vendredi 4 décembre 2009

Punkee blues


Il y a à peu près un mois, Punkee s'est mise à se plaindre de maux de ventre.

On a d'abord blâmé une "hypocondriaquerie" afin d'éviter d'aller à l'école.

Puis comme les maux de ventres devenaient insistants nous avons mis son grand frère, Monkee, sur une mission d'espionnage afin de vérifier si les petites amies de l'école étaient gentilles avec Punkee dans la cour de récré.

"Rien à déclarer 'pa Punkee tout le monde l'aime, même en 6ème année ils la connaissent"

"Justement, ils ne la niaisent pas ou ne jouent pas à l'intimider?"

"Non tout le monde veut jouer avec"

Vérification faites auprès du prof, de la direction, du prof d'éducation physique, tout va comme sur des roulettes. Comme hier soir au dodo les maux de ventre reprenaient, papa en avait plein son casque et l'a trainée ce matin à la clinique afin d'élucider tout ça avec un professionnel.

Numéro 93.

Le tableau affiche que la clinique sert présentement le numéro 73. On a prévu le coup on a amené quelques livres avec nous. Lilou & Émile à la ferme, l'Enfant Nuage & Sucrés Valentins pour Punkee, un Mordecai Richler pour moi et qui m'expose comme un juif aux yeux de tous. Ce que je ne suis pas même si je sens le gin tonic. En lisant Barney's Version en français je me suis rendu compte de ce qui m'a poussé à retourner aux études en traduction. Lire que Dickie Moore a "atrappé un carton rouge en troisième tier pour faire perdre les Canadiens" ou que "Maurice Richard avait obtenu 22 passes-gagnantes" est si irritant que je me demande pourquoi je n'ai pas pris le livre en anglais. J'ai eu le temps de lire 103 pages.

Ça ne dit pas que je lises vite autant que nous ayons attendu une demie-éternité.

Punkee n'a jamais eu l'air si heureuse. Pas de maux de ventre ni rien. Elle ne semble jamais plus heureuse que quand avec papa à la maison ou en commission.

"Monsieur Rouleau porte numéro 2" jappe le haut-parleur.

"Rouleau? comme Rouleau de papier de toilettes?" dit Punkee suffisament fort pour que certains l'entendent et en rigole. Ceci lui fait prendre compte de son public. Deux jeunes garçons d'à peu près de son âge s'installent tout près. Punkee prend note et commence son show. Elle joue avec mon signet en hologramme qui montre trois éléphants en marche dans la faune. Elle s'installe dans un angle tout à fait peu naturel pour jouer avec le signet. Dans un angle surtout pour faire l'agace devant les deux petits gars. Ça marche. Ça me purge. Je lui demande de lire avec moi, elle se tanne rapidement et étale tout ses livres presqu'aux deux pieds des deux petits gars qui se plaignent déjà que "c'est long" (Ça fait à peine 15 minutes les enfants nous on y est depuis 3 heures...).

Punkee ne lit pas, elle valide tout ce qu'elle fait en s'assurant du regard que les petits gars la regarde. Ça m'agresse horriblement. On change de place loin des deux spectateurs forcés.

Cet endroit me rend tendu. J'ai toujours l'impression de venir frencher la maladie quand je rentre dans ses mourroirs...

"Punkee Jones porte numéro 2" annonce le haut-parleur.

"Avec Rouleau?" demande-t-elle

"mais non mais non, Rouleau est flushé, bébé"

Bien entendu le doc ne trouve rien. On parle d'angoisse. Je commence à comprendre. Je vois les tremblements de Punkee quand le docteur lui demande de s'allonger. On lui a fait coller les oreilles il y a un mois et je devine un certain traumatisme possible depuis.

On retourne à l'école pour l'après-midi.

"Tu as peur de quelque chose ma belle pitchounette?"

"Non papa, j'ai juste peur de vomir"

"Tu ne vomiras pas beauté, c'est adulte qu'on attrape la nausée"

"Je suis une grande fille papa"

"Je sais, mais encore une enfant, laisse-moi angoisser pour toi. Quand tu seras ado ce sera mon sport, d'ici là, fonce bébé, fonce"

1 commentaire:

Cybèle a dit...

Bien raconter Jones, cette tranche de vie quotidienne. J'aime ta conclusion."Fonce bébé, fonce." :D