dimanche 28 mars 2010

Lucien Ginsburg


Fils d'immigrants russes juifs, l'homme à la tête de chou rêve d'abord de devenir peintre.

Son père avait étudié la peinture et la musique après tout et sa mère était mezzo-soprano. Lui sera pianiste de bar et de cabaret et elle chante au conservatoire russe. Ils ont un premier fils, Marcel, qui meurt en bas âge de maladie. Ils auront ensuite une fille, Jacqueline, en 1926, puis des jumeaux, Liliane et Lucien, en 1928.
Les années de la guerre sont difficiles : Lucien est obligé de porter l'étoile jaune. Il devra même se cacher trois jours durant dans une forêt tandis que les SS recherchent les Juifs. La famille se réfugie en province en 1944 sous le nom de Guimbard.

Suite à la libération, Lucien passe d'échec scolaire en échec scolaire. Jusqu'à l'âge de trente ans, Lucien qui se trouve laid et se réinvente en Serge Gainsbourg, vit de petits boulots. Il est tour à tour professeur de dessin, de chant, gardien de nuit. Mais son activité principale est la peinture. Il aurait aimé être un génie de la peinture comme Francis Bacon ou Fernand Léger, dont il fut l'élève, mais il abandonne rapidement la bohème pour devenir crooner de piano-bar dans les casinos de la côte ou dans des boîtes parisiennes.

Il a une révélation en voyant Boris Vian. Il s'inspirera toute sa vie de cet homme à la drôle de tête qui écrit et interprète des textes provocateurs, drôles et cyniques. Il compose en secret mais accompagne surtout discrètement au piano les autres. En voulant découvrir ses toiles, la chanteuse Michèle Arnaud découvre plutôt ses chansons et le pousse à enregistrer ses morceaux. Son premier album est un échec commercial mais au moins son maître Boris Vian, avant de mourir en 1959, le compare à Cole Porter. Ce qui n'est pas rien.

Lorsque l'époque des yéyés arrive, il est alors âgé de 32 ans, il n'est pas très à l'aise : il passe en première partie de Brel ou de Gréco, mais le public le rejette et les critiques, cruelles, se moquent de ses grandes oreilles et de son nez proéminent. Ceci le marquera à jamais.

Excessivement prolifique et brillamment inspiré, il écrit alors beaucoup pour les autres étant rejeté derrière les projecteurs. Son album Gainsbourg Confidentiel est empreint d'un jazz archimoderne, suit Gainsbourg Percussions, inspiré lui des rythmes africains. Ces disques sont nettement en avance sur leur époque et le public ne les achète pas. Toutefois Gainsbourg devient riche et très en demande avec les hits qu'il écrit pour Juliette Greco, Petula Clark, Françoise Hardy pour qui il pousse le zèle à lui composer un texte rimé en "ex". Toutefois c'est la jeune France Gall qui le propulse au sommet du monde quand elle gagne l'eurovision avec un de ses titres. Les jolies femmes se succèdent dans la vie de Gainsbourg comme autant de victoire contre tous ceux qui l'avait cicatrisé lors de son premier passage sur scène. En 1966, Gainsbourg répète l'exploit de l'année précédente en donnant un autre gros hit à France Gall avec un texte à double sens érotico-baveux. Tout ce qu'il touche alors se transforme en or.

Les femmes, toutes plus belles les unes que les autres, se succèdent soudainement dans les studios sous sa plume...et dans son lit sous son corps. Il écrit pour la femme la plus désirée d'Europe, Brigitte Bardot, avec laquelle il vit une passion courte, secrète (car elle est mariée) mais torride. Harley Davidson, Bonnie and Clyde, Je t'aime... moi non plus.
Cette dernière chanson, devenue un succès planétaire sur le disque de Gainsbourg, est réenregistrée en duo avec Jane Birkin pour dissiper les doutes sur le cocufiage que Bardot impose à son mari.

Gainsbourg trouve en Birkin la femme-enfant qu'il cherchait. Il lui compose 69 Année Érotique. Elle chante avec lui Comic Strip et Initials B.B. (écrite pour Bardot). Ils deviennent pendant dix ans un couple très médiatique, les Brad Pitt & Angelina Jolie Français, à la une de l'actualité.

Les années 70 imposent 4 albums incontournables de Gainsbourg. Histoire de Melody Nelson en 1971 album aux ambitions symphoniques osées et un album grandiose en soi avec Jane Birkin dans le rôle de Melody Nelson. En 1973, l'album Vu de l'extérieur fait faire une crise cardiaque en plein studio au moment même où il enregistrait la chanson phare de l'album au titre pour le moins ironique...Gainsbourg, sous l'emprise du personnage mysogine, alcoolo et frondeur annonce qu'il s'en sortira en augmentant sa consommation d'alcool et de cigarettes. Rock around the bunker en 1975 ose l'humour et la shoah. Il tourne en dérision, au second degré, l'esthétique et la verroterie nazie. Puis en 1976 il nous offre le somptueux L'Homme à la tête de Chou avec ses Variations sur Marylou.

Il cultive son aura d'artiste culte en participant à de nombreux films. Il tourne en 1976 son premier film Je t'aime Moi Non Plus qui obtient très vite une réputation sulfureuse avec un scénario audacieux touchant aux tabous de l'homosexualité et de l'érotisme. Il réalise trois autres film(dontÉquateur en 1983) qui obtiennent peu de succès, les sujets abordés étant souvent provocateurs, que ce soit l'inceste (Charlotte for Ever en 1986), l'exhibitionnisme (Stan the Flasher) ou l'homosexualité...

En 1978, son nouvel album enregistré à Kingston devient disque de platine en quelques mois. La Marseillaise reggae choque le journaliste du Figaro Michel Droit qui écrit un article virulent selon lequel, en antisémitisme, «il y a aussi des rabatteurs ». Serge Gainsbourg lui répondra par voie de presse dans un article intitulé On n'a pas le con d'être aussi Droit. La salle de concert de Strasbourg où il doit se produire est investie par des membres d'une association d'anciens parachutistes militaires qui désapprouvent sa version de la Marseillaise, mais Gainsbourg garde tout son sang-froid et les prend au dépourvu en chantant a cappella, et le poing tendu, la version originale de l'hymne français. Ils sont donc de ce fait obligés de se mettre au garde à vous après un moment de flottement. Estimant avoir eu réparation, les millitaires se retirent. Gainsbourg poursuit une tournée triomphale, accompagné de Sly and Robbie et des choristes de Bob Marley : les I Threes.

Mais Gainsbourg le personnage occulte Gainsbourg le brillant créateur et les années qui suivront seront plus intéressantes au niveau des frasques qu'au niveau des produits artistiques. Il devient "Gainsbarre".

Les boîtes de nuit, les beuveries, le noctambulisme, la décrépitude physique…Il forge ainsi sa légende de poète maudit mal rasé et ivre qui lui vaut tantôt l'admiration, tantôt le dégoût. Birkin en a peur et le quitte en 1980.

Il rencontre une nouvelle égérie, Bambou, pour laquelle il tente de recréer la magie du couple maudit. Il lui fait chanter quelques titres qui ne rencontrent pas les faveurs du public. Les années Gainsbourg sont bel et bien terminées.

Gainsbourg s'éteint en 1991 à la suite d'une cinquième crise cardiaque.
Le comble pour celui qui suivait, affligé, les enterrements de ses cardiologues successifs...

Un film retraçant la vie de ce délirant bonhomme vient de sortir sur les écrans Montréalais.
J'avoue avoir eu un choc en voyant la ressemblance frappante entre Eric Elmosnino et le vrai Gainsbourg.

C'est réalisé par un bédeiste en plus (Joan Sfar) ce qui devrait rendre le tout encore plus intéressant.

Je ne veux pas voir le film.
Je veux le posséder.

Vous me trouverez en salle cette semaine.
En attendant de pouvoir me l'acheter.

En attendant je me passe en loop son excellente fille.

Aucun commentaire: