lundi 25 avril 2011

Cyberintimidation

Nous avions rendez-vous expressément à l'école de mes enfants. Une lettre, très officieuse, faisait état de "la situation urgente", de la "présence obligatoire" et de la "croissante intensité de certains cas d'intimidation" à l'école.

Seuls les parents des sixième années étaient sommés de se présenter car le problème semblait s'y concentrer.

Comme je suis le principal intervenant dans les devoirs et tout ce qui est scolaire par rapport aux enfants, je me suis rendu sur place un soir de match des Canadiens. C'est dire le niveau d'urgence ressenti à la lecture de la lettre.

Très vite on a senti une certaine tension chez les parents dans le public. Tout d'abord parce que la directrice a dû être aidée par trois fois afin qu'on lui souffle le mot "Facebook" qu'elle n'arrivait pas à trouver. Cette ignorance a inquiété tout le monde. Aussi parce que derrière les 7 représentants scolaires sur place, il y a avait entre autre une policière. Après un laius relativement long et fastidieux de la directrice où on sentait qu'elle marchait sur des oeufs, une première maman est intervenue.

"C'est-il passé quelque chose pour que nous soyions convoqué avec urgence comme ça?"

La directrice a alors passé le relais à une jeune fille de 19 ans qui a commencé sa présentation Power Point sur la cyberintimidation.

Bon.

Là tous les parents étaient officiellement inquiets. La jeune fille ne répondait pas à la question du tout et nous enseignait (en survolant ses pages Power Point très rapidement d'ailleurs "Vous aurez tout ça à la sortie en copie papier de toute façon") ce qu'était l'intimidation, l'intimidateur, et gnagnagna...c'était un brin didactique et loin de ce qui intéressait vraiment les parents. De plus, la jeune Émilie nous donnait du conseil de parent alors qu'elle avait 19 ans et...zéro enfant. Tout le monde était encore fébrile quand une mère a encore changé le rythme.

"Je ne sais pas si vous allez en parler, mais saurons nous si il s'est passé quelque chose récemment à l'école?".

Je connais cette mère. Elle enseigne dans une autre école, une école de "cas" difficile. Elle enseigne à un des joueurs de hockey de l'équipe à mon fils, un cas justement.
Le fils de cette mère, qui est dans la classe au mien, est aussi un jeune cas. Derrière la question de cette mère se cachait "Mon fils est-il impliqué dans les conneries dont vous évitez de nous parler?".
La directrice a compris.
"Si votre enfant est impliqué dans quelque chose, vous êtes déjà au courant" a -t-elle dit rassurant la moitié de l'assemblée.

Ce qui devenait de plus en plus évident, c'est que ses gens, en position d'autorité, semblaient tout à fait dépassés, ou en voie de la devenir, par une situation dont nous ignorions tout de la teneur. Ce qui sautait aux yeux, c'était aussi le criant manque d'hommes.

Il y avait devant nous 8 personnes. Trois femmes dans la cinquantaine, trois enseignantes de sixième année, une intervenante de 19 ans et une policière. Deux des trois femmes dans la cinquantaine semblaient complètement dépassées par le contenu de la soirée. L'une d'elle était la directrice. La troisième est restée silencieuse. Les trois enseignantes de sixième année, je l'oublie chaque fois, sont d'extrèmement belles jeunes femmes. Je crois sincèrement qu'elles sont la source de l'éveil récent par rapport aux filles de mon garçon. Ce sont trois belles filles, des filles-filles. Vous comprenez ce que je veux dire? Pas des Jocelyne Cazin, des Sophie Thibault ou des Roseanne Barr, des filles toutes coquettes, féminines. Qui auraient joué à la princesse plus qu'au soccer dans la cour de récré au même âge. De très bonnes enseignantes by the way, mais des filles, très filles. Pas une once de virilité. Et il y avait cette policière, habile dans ses propos (ça fait 12 ans qu'elle les tient dans les écoles) mais d'une taille minuscule (qui expliquerait peut-être pourquoi on l'a envoyé dans les écoles) et dont les techniques pour nous faire rire fonctionnaient mais éloignait vraiment des réèls inquiétudes de la soirée.

"Pourquoi maintenant alors qu'il ne reste qu'un mois et demi d'école?"
"Pourquoi juste les 6ème? ce sont eux la nature du problème?"
"Pourquoi ne pas avoir tenu ce type de rencontre depuis la première année, ainsi la marmite ne sauterais pas?"

La vraie réponse à cette dernière question est "le roulement de personnel est tellement important dans cette école que d'assurer des suivis d'une année à l'autre est pratiquement impossible." Mais elle n'a pas été formulée ainsi puisque l'ironie aurait été trop grande venant de la bouche d'une directrice en poste depuis seulement un an et demi et qui revient de deux mois off, on ne sait trop pourquoi.
La tension était palpable. Les premiers intimidés étaient de toute évidence les représentantes scolaires. Rapidement les parents d'intimidateurs se sont trahis.
"Vous dites qu'il faut aider quand un ami est dans le trouble, c'est ce que mon fils a fait et vous l'avez puni"
"Je connais votre fils madame, il a choisi de casser une chaise sur la tête de l'autre pour l'empêcher de se faire battre! mauvaise décision!"

Ah...on commençait à se ranimer, nous parents ennuyés d'enfant trop gentils.

"OUI! et c'est sur mon fils qu'il a cassé sa chaise est intervenue une mère!"

Je manquais ma game des Canadiens et ça me faisait chier, j'ai laissé tomber les gants:
"SI VOUS L'ÉLEVIER PAS COMME UN CHIEN AUSSI! Ça rentre dans l'école pis ça pousse tout le monde! tellement habitué de tasser les 6 chiens que vous avez chez vous!..."
Je savais de quoi je causais, ma fille était allé à la fête de leur plus jeune et les 6 chiens l'avait terrorisée. Ce que je ne savais pas c'était que le père, divorcé, de cette même femme, n'a pas apprécié que je crie à son ex et il m'a plaqué par derrière comme un joueur de football. Bien vite tout le monde se frappait à coup de chaise plastique et on se serait cru dans un parlement coréen.

Pas mal tout le monde s'est battu, c'était très cool. J'ai même lâchement profité de la situation pour clouer au sol l'une des trois enseignantes si jolies qui était intervenue et nous nous sommes longuement regardés dans les yeux. Cool je vous dis.

Dans la mêlée un parent a crié :
"J'T'ENCULE PÉTASSE!!"
Une autre a hurlé avec une voix de sorcière:
"TA FILLE EST UNE PUTE!"
Un troisième a rugit:
"J'VAS TOUTES VOUS ARRACHER 'À TÊTE!"

Après une heure de danse à 40, et avant l'arrivée des policiers, un père qui avait eu la bonne idée de trainer avec lui des bombes fumigènes (fumeuse idée) les as lancées dans le gymnase où nous étions, nous laissant fuir chacun chez soi dans la confusion enboucannée.

Fuck the school, man.
C'est gêré par des fillettes.
Un soir de game des Canadiens...
Un match qu'ils ont dominé mais perdu quand même.

On aura jamais su si i'y s'était passé que'quechose à l'école.

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