mardi 10 mai 2011

Phil Spector

Quand il avait dix ans son père a choisi de s'enlever la vie à New York.

Sa mère décide alors d'emménager sur la côte ouest en Californie où Spector, adolescent, découvrira la musique.

Il se monte des petits bands, gratte la guitare et erre si fréquemment dans les studios d'enregistrements qu'il se fait des amis parmi les gens de la production et réussit à s'acheter deux heures d'enregistrement. Il les utilise afin d'enregistrer une chanson qu'il a écrite et qu'il enregistrera avec des amis sous le nom de The Teddy Bears. La chanson connait un relatif succès, nous sommes en 1958, Spector a 19 ans. Avant la fin de la même année, The Teddy Bears obtiendra un #1 avec un autre titre de Spector inspiré de l'épitaphe sur la tombe de son père qui vendra un million de fois aux États-Unis.
Bien que le band enregistre un album par la suite, le succès n'est plus au rendez-vous et le groupe se sépare dès 1959.

Spector est un fan des singles. Il considère qu'un album c'est 2 hits et 8 cochonneries. Il choisit de s'investir et de s'intéresser à la production. Il produira quelques artistes ici et là dont une chanson que les Isley Brothers mais surtout quatre garçons dans le vent rendront immortelle quelques années plus tard. Il travaille aussi comme musicien de studio (solo de guitare ici) et fonde avec Lester Sill et Lee Hazlewood The Spectors Three.
Il écrit ou produit quelques morceaux qui deviennent de gros hits au début des années 60. Il produit plus de 25 succès entre 1960 et 1965 faisant de lui une valeur sûre dans le milieu.

À ce moment de sa vie, il a perfectionné une méthode d'enregistrement qui le rendra célèbre: le mur du son. La technique, par opposition à l'enregistrement d'une chanson en direct avec tous les instruments joués comme en spectacle en studio, consiste à enregister une fois en direct, puis réenregistrer plusieus fois, quitte à enregistrer des instruments complètement seuls et de les doubler, tripler, quadruplé a mixage par la suite. Spector donnera plusieurs couches de sons aux musiques qu'il travaille afin de créer un espace sonore plus riche, souvent inspiré de la musique classique. Quelques fois, deux cordes de violon étaient rérenregistrées si souvent que l'on pouvait faire croire un orchestre de 12 violons.
Retravaillant les chansons ainsi, il se greffe comme co-auteur sur plusieurs morceaux s'assurant ainsi une multitude de revenus supplémentaires.

Malgré de très gros hits, malgré le fait qu'il domine les studios, malgré le fait qu'il marie Ronnie Bennett, malgré le fait qu'il soit propriétaire de sa propre étiquette de disque, même si tout ce qu'il touche se transforme en or, il s'ennuie. En 1967 il se joue lui-même dans (l'atrocement sexiste) I Dream of Jeannie, il joue aussi un petit revendeur de drogue dans Easy Rider de Dennis Hopper. De plus en plus consommateur lui-même, il fait tomber progressivement sa femme dans la drogue aussi, produisant même un titre de George Harrison sur le sujet pour elle.

Les Beach Boys empruntent ses initiales pour leur album Pet Sounds, Brian Wilson le considérant comme un grand rival. Son frère Dennis écrira à Brian une très touchante chanson par la suite (quand Brian s'effondre mentalement) où il lui suggère d'écouter Phil Spector pour se remettre sur pied.

En produisant un hit pour John Lennon, Spector intéresse soudainement Lennon & Harrison qui veulent relancer la production de Let It Be (alors appelé Get Back) et l'amène en studio. L'impact de Spector sur l'album des Beatles est très important. McCartney détestera sa production de The Long & Winding Road, terminée sans lui et resortira Let it Be...Naked en 2003 pour présenter le son qu'il voulait à l'époque. Cette association fait toutefois des partenaires de travail de Lennon et Harrison pour les années à venir. Spector produit l'album le plus vendu de Lennon puis rafle un grammy pour l'album de l'année pour Harrison en 1972.

Fin 1973, Spector travaille sur l'album Rock'n Roll de John Lennon, mais l'entourage de ce dernier est si envahissant pour Spector qu'il brandit un fusil, menace tout le monde et se sauve avec les bobines d'enregistrements. Lennon les récupère quelques mois plus tard et complète le travaille lui-même. Dans les années 70, Spector, déjà une sorte d'ermite, vit de plus en plus isolé du monde. En 1974, il est victime d'un très grave accident de voiture qui lui laissera 300 points de sutures au visage et 400 autres derrière le crâne. Il portera toute sorte de perruques pour le reste de ses jours. Ses problèmes de bipolarité sont alors exacerbés.

Le personnage de Swan dans Phantom of The Paradise de Brian DePalma joué par Paul Williams est inspiré de Phil Spector.

En 1977, il produit et co-écrit un album avec Leonard Cohen. Ce dernier, généralement fortement impliqué dans le mixage est gardé hors de la salle de montage et est menacé par Spector avec une arbalète. Cohen (et ses fans) détsteront les arrangements de cet album et Cohen en viendra à ne pas le reconnaître complètement n'utilisant qu'une seule chanson de cet album dans ses spectacles futurs.

Afin de tenter de rejoindre un public moins confidentiel, Joey Ramone des Ramones fait appel à Spector pour leur album de 1980, End of the Century. Pour les chansons plus douces, tout fonctionne bien, pour les chansons plus punk c'est la catastrophe. Leur album sera quand même leur plus gros hit. Pendant l'enregistrement, Spector dépose un fusil sur le comptoir pour faire valoir ses arguments.

Il est plutôt inactif durant les années 80, 90 et 2000.

Le 3 Février 2003, divorcé depuis longtemps, il reçoit chez lui l'actrice de série B Lana Clarkson. Il lui met un fusil dans la bouche et lui fait sauter la tête. Spector clame qu'il s'agit d'un "suicide accidentel" mais des conquêtes du passé viennent témoigner que l'une des fantaisies de Spector est de faire sucer à une femme le bout d'un fusil rarement de plein gré. Son procès sera tenu de 2007 à 2009.

Deux mois auparavant il confessait à un journaliste qu'il était "relativement fou" (mais surtout bipolaire).

En 2007, lors de l'enterrement de Ike Turner avec lequel il avait travaillé dans le passé, en pleine eulogie, il raconte que Tina Turner doit tout à Ike Turner et écorche Oprah Winfrey qui aurait démonisé Ike dans sa biographie de Tina Turner.

En 2009 il écope de 19 ans de prison. Il aura 88 ans avant de pouvoir demander une libération.
Son premier appel a été rejeté la semaine dernière.

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