mercredi 10 août 2011

Sous Les Projecteurs, Dans les Gradins

Quand j'étais ado, fin des années 80, mon père était alors président du circuit de hockey Junior AAA dans la région de Québec.
 Afin d'économiser sur son "entreprise" et aussi afin de s'assurer que je ne me dessine pas un parcours Sex, Drug & Rock'n Roll comme j'étais en voie de le faire, mon père me faisait travailler comme Relationiste-Publiciste-Statisticien de sa ligue.
Je devais (idéalement) assister à certains matchs de la ligue contenant 8 équipes de la région, absolument en reçevoir toutes les feuilles de matchs afin d'entrer les statistiques dans l'ordinateur* et les lignes ouvertes sportives de la région me gardait une fenêtre sur leurs ondes où je devais les appeller pour faire un compte-rendu des matchs et en somme essayer de vendre le produit aux amateurs de hockey de la région.

Je me débrouillais très très bien.

Premièrement parce que, portant trois chapeaux je m'étais négocié triple salaire, mais aussi parce que je n'assistais pas à tous les matchs et réussissait toujours à bâtir selon les feuilles de matchs, une histoire que je croyais (et que souvent on me confirmait) excitante. Certains soirs, et je m'en trouve gêné, c'est mon brave papa qui m'appelait là où j'étais pour me dire quoi dire à la radio et je me retrouvais parfaitement saoûl en ondes. La pub c'est de la fraude de toute façon. C'est pas arrivé souvent mais je me souviens d'un soir de brosse chez l'ami Danny Beckett où j'étais si saoûl pour parler à la radio que j'ai dégrisé peu de temps après mon appel tellement je sentais que j'avais laissé tombé mes responsabilités. Mon père ne m'en as jamais parlé, donc peut-être étais-ce pire dans ma tête.

Comme cette ligue comprenait les joueurs que le Junior Majeur, une ligue qui peut mener à la Ligue Nationale, avait délaissé, le niveau de frustration des joueurs était assez élevé. Je devais parler des matchs en tentant de rappeller qu'il y avait bien du beau hockey qui se jouait et pas seulement des batailles (nombreuses aussi) tout en sachant qu'une partie du public ne venait voir les matchs que pour voir 6-7 batailles.

À Beauport, dans l'aréna qui hébergeait un club très robuste, le spectacle n'était pas sur la glace. Il y avait un groupe d'amis dans la jeune vingtaine qu'on appellait entre nous "Les évadés de Giffard" (Giffard est un centre qui s'occupe gens avec des troubles mentaux et qui se trouve à Beauport). Ils étaient 7 ou 8, suffisament nombreux pour occuper tout l'espace derrière le banc du club local. Ils scandaient des ânneries sans arrêt du début à la fin du match. À 7 ou 8, ils se relançaient entre eux. Ils disaient tout ce qui leur passaient par la tête afin de distraire les joueurs d'en face et les arbitres. Au nombre de conneries que ses gars sortaient dans un match il y avait toujours quelques moments très drôles.

"Hey Morrisette (un joueur), ça rime avec tapette!"
"Ouais mais celui qui vient de te dire ça s'appelle Ouimet!"
"Oui mais Ouimet pourrait t'écraser dans le coin comme un Whippet!"
"Ça arrivera pas tu y vas pas twé dans le coin Morrisette!"
"Trop Tapette!"

Ils étaient infatigables. C'était comme ça du début à la fin du match et ils étaient toujours très en forme. Ils s'étaient pratiqué avant où je ne sais trop mais leur statut était connu partout dans la ligue. En jouant à Beauport il fallait faire aussi face aux "Évadés de Giffard". Le gens dans la foule leur laissait tout le crachoir. Ils faisaient un show et le savaient. Ils arrivaient préparés. L'organisation du club de Beauport ne pouvait pas complètement intervenir (puisque ses clowns s'en prenaient aussi des fois à leur propre club et les déconcentraient très certainement aussi) et se contentait d'engager deux policiers pour faire la garde à chaque match afin que ça ne dégénère pas dans la foule. De plus, l'organisation les aimait bien car, non seulement les gars faisaient rire tout le monde en offrant un deuxième spectacle, mais des gens dans la foule amenait des amis (je l'ai fait aussi) afin de leur montrer le zoo et les places étaient payantes. Le building était toujours plein.

Leur importance était si grande que l'instructeur du club de Beauport les avait réunis, comme il aurait fait avec ses joueurs, pour leur dire de se calmer le pompom de temps à autre car les gars perdaient leur concentration. Des vedettes je vous dis. Ses gars-là, qui avaient tous l'apparence de repris de justice, étaient des stars et l'aréna était leur royaume. Ils savouraient chaque matchs comme si c'était leur scène de stand-up comique.

Je n'ai pu m'empêcher de faire des parrallèles avec les Évadés de Giffard quand j'ai lu l'actualité autour du club de soccer de l'Impact de Montréal cette semaine.

Je n'ai jamais assisté à un match de l'Impact mais selon ce que je crois comprendre, leur saison est misérable cette année.  Il y a maintenant bisbille entre le directeur sportif et ancien joueur du club Nick De Santis et un groupe de supporters qui se présente comme "les ultras".

Ce groupe d'infatigables passionnés sont fidèles à l'impact depuis 9 ans. Ils assistent à tous les matchs et se déplacent même à l'extérieur pour les encourager. Québec, Sherbrooke, Syracuse, Toronto, Rochester, Cary, Cleveland, Torreon, Vancouver et Baltimore sont autant de villes où ils ont suivi leur club favori et quelques fois à plusieurs reprises. Ils ont écrits une lettre ouverte à Nick De Santis et au président du club Joey Saputo pour se vider le coeur cette semaine. Ils l'ont écrite en rispote à une intevention à la télévision de Joey Saputo. Un autre partisan a aussi lancé la serviette via les quotidiens. Rien d'autre que le congédiement de Nick De Santis par Joey Saputo ne saurait satisfaire ses fans.

Le diable est aux vaches.
Et le club est supposé entrer dans la ligue MLS l'an prochain, une ligue plus prestigieuse parait-il.

Quand il y a trop de joueurs sur un même terrain...
Ça semble toutefois en ce moment être un problème de gérance d'estrade. Très public mais un problème de gestion de gradin pareil.

*Le gars que j'ai remplacé aux stats avait quitté car il refusait d'entrer les stats dans un "vilain" ordinateur, lui qui avait toujours fait cela à la main sur une dactylo et gardé ses comptes sur du papier quadrillé...

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