dimanche 5 octobre 2014

L'Éducation Qui Saigne

Il y a quelques années, quand mon fils était au primaire, un nouveau est apparu dans leur classe et a demandé un midi à la récré de jouer avec eux. Le jeu auquel se prêtait les garçons se jouait à 5 et ils étaient déjà 5.

Pour l'avoir refusé dans leur jeu, ils ont tous été punis.

Hm...

Quelques années plus tard, il devait alors être en dernière année du primaire, il marchait pour se rendre à l'école. Au loin, il aperçoit deux camarades dans la neige. Il remarque que l'un est couché en boule se protégeant et que l'autre le mitraille de boules de neige, jeu auquel ils se prêtent souvent. Il se rend pour les voir. Quand celui qui était couché se relève la tête, il voit mon fils, l'autre qui lui tirait des balles de neige et un troisième jeune qui arrive de nulle part pour voir ce qui s'y passe. Celui qui était au sol se vengera. En se relevant, il dénoncera les trois têtes qu'il a vues et les trois seront punis. Un pour avoir agressé (ce que les deux autres n'ont pas eu le temps de comprendre) et les deux autres pour n'avoir rien fait. Ce qui était faux car mon fils avait eu le temps de dire à l'agresseur, une fois qu'il avait compris que c'était moins un jeu qu'une chicane : "Come on les gars, vous êtes cons!"

Peu importe, il a été jugé pour intimidation.
Un mot que personne ne comprend complètement en éducation.

Ma fille l'an dernier...c'est tout ici dans la première partie.

Les écoles et leur personnel sont de plus en plus dépassés par leurs élèves. Par leur époque aussi. Je ne parle pas nécessairement des baby boomers qui ont justement le temps jouant contre eux. Je peux facilement comprendre qu'à un certain moment de sa vie on ne souhaite plus complètement se convertir à ce qu'on déguise en "progrès". Non, je parle aussi et surtout des enseignants de mon âge (42) qui peuvent, comme moi, avoir eu un parcours scolaire sans avoir même effleuré un ordinateur en graduant en 1994. Pas par mauvaise foi, simplement parce que ce n'était alors pas nécessaire.  Ces gens de mon âge peuplent majoritairement l'école de mon fils en tant qu'enseignant au secondaire. Les élèves ont depuis deux ans tous un Ipad. Il y a bien quelques tentatives de bloquage de sites de la part des autorités scolaires, mais les élèves en connaissent beaucoup plus qu'eux sur les manières d'ouvrir les serrures de ces sites "supposés" fermés à clé. Ils ont un plaisir fou à suivre autre chose en classe que ce qui est enseigné en tout temps.

On leur apprend l'impatience mentale. La distraction. L'intolérance à l'ennui. On les gâte.

Rares sont les mots comme "gâte" qui soient autant source de bonheur que péjoratifs.
De quels côtés tombera mon fils?

Pour revenir à ce que je racontais plus haut. le milieu de l'éducation peine à cerner ce qu'est l'intimidation. Pour certains, se défendre avec tempérament est signe d'agression. Pour d'autre refuser un ami dans un groupe déjà complet est signe d'intimidation. Enfin pour d'autre zélés, vaut mieux fuir à toute jambes le lieu d'une bataille sinon vous serez jugé pour y avoir "participé".

L'intimidation pour moi, voyez-vous, c'est aussi le refus de l'école secondaire de mon fils que deux amoureux se tiennent par la main dans les corridors. Oui, oui, pour vrai. Il est interdit de s'embrasser ou de se tenir la main à cette école. On vous sépare.

Enfants du divorce, jaloux, rappelez-nous ce qu'était 1963.

Je peux comprendre l'embrassage qui peut mener à la passion aveugle, aux attouchements et aux témoins qui crieront "Prenez-vous une chambre à l'hôtel, bordel!" mais se tenir la main du bout des doigts?...s.v.p...

Pour vous montrer à quel point certains enseignants sont nus devant leur élèves, une responsable sociale est venue parler aux ados dans la classe de mon fils du "vol de droits d'auteur sur le web". Elle a fait un émotif plaidoyer contre ITunes et ITube qui volaient chaque artiste. "Vous n'avez pas honte?" disait-elle aux élèves qui rigolaient beaucoup.

Ils ont grandi à l'ère de Facebook, madame.
Rien n'est à personne.

Les plus jeunes enseignantes, c'est plate à dire car ils/elles ne sont surement pas toutes/tous ainsi mais depuis plus de dix ans je les souffre, ne savent tout simplement pas écrire. Ils/elles savent enseigner. ÉCRIRE? non. Elles/ils enseignent donc quoi?
Comment peuvent-ils bien enseigner l'écriture à autrui si ils ne comprennent pas la grammaire eux-mêmes?

Jeudi dernier, Lindsay Jacques, attachée de presse de la ministre de la Famille Francine Charbonneau et responsable du dossier sur "l'intimidation" a organisé un forum sur le sujet. Il y a deux ans, le projet de loi 56 visait à juguler le problème. Mais on ne comprend pas le virus. Rien, sinon peu a été fait.

On a surtout voulu répondre à la question "Qu'est-ce que l'intimidation?"

C'est déjà un pas. Ajuster les montres de tout le monde à la même heure.

Mais avec les coupures annoncés par le gouvernement qui gère désormais tout comme une business, même les endroits comme les hôpitaux et les écoles, (non inventés pour générer des revenus), croyez-vous vraiment que quelqu'un s'appliquera à faire circuler les conclusions à ceux qui gèrent les classes ou en cour de récré?

L'intimidation est floue, espérons qu'une attachée de presse, (la ministre est bien trop occupée) saura éclaircir quelques zones.

Même si l'attachée semble très jeune et que Francine Charbonneau pourrait être sa mère.

Les parents sont-ils encore à l'écoute de leurs enfants?

Les jeunes sont ils attentifs à leurs aînés?
Les enseignants sont ils encore intéressés par leurs élèves?

Est-ce qu'on s'écoute encore?

Est-ce moi ou l'éducation saigne?

Au moins, on recherche un remède.
Sans fonds, mais bon...

Rajout: le même jour la ville de Montréal mettait ses culottes face à l'intimidation, syndicale celle-là, et c'était tout aussi tant mieux.


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