mercredi 26 novembre 2014

Faces d'Amérique

Chaque pays traîne sa part d'ombres.

En Allemagne, il y a les Nazis. En Italie et ailleurs, la corrosive corruption systémique chez les autorités. En Chine, les droits humains. En Russie Staline et ainsi de suite.

Aux États-Unis, la relation avec ses propres habitants à la peau noire est une vraie horreur.

"Je suis ici depuis assez longtemps pour savoir que la vie d'un noir n'est pas importante aux yeux du gouvernement" a dit une femme du Missouri de 63 ans.
"No justice, no Peace" scandait les gens dans les rues en feu de Ferguson.

Ferguson, c'est cette ville où un policier blanc a tiré 6 balles sur un géant noir qui ne voulait pas obtempérer à ses ordres et qui aurait peut-être eu les mains dans les airs à une certaine distance. Le tuant.

La vérité n'est pas tout à fait claire autour de ce qui s'est passé. Des témoins ont dit des choses, puis se sont rétractés. Y a-t-il eu contact physique au préalable? qui l'a initié? Rien n'est moins clair. Seul Darren Wilson, le policier blanc qui a tué, le sait. Mais encore, peut-être s'est-il convaincu de ses propres menteries sur le sujet.

On ne le saura jamais.

Ce que l'on sait toutefois c'est que Micheal Brown, 18 ans, venait de voler une petite boîte de cigarillos dans un dépanneur avec une hostilité tout ce qu'il y a de plus démonstrative à l'égard du propriétaire du dépanneur. Sans savoir cela, un policier s'est approché en voiture et a demandé à Brown et à un de ses amis qui l'accompagnait, de marcher sur le trottoir et non dans la rue, recommandation qu'ils ont tout les deux ignoré.

La suite, c'est de la bouette.
Personne ne dit la même chose.

Au bout du compte, Brown est mort, atteint de 6 balles. Il n'était pas armé.

La version de Wilson est que Brown a tenté de lui voler son propre fusil. Wilson a craint pour sa vie et a visé Brown. L'autopsie révèle toutefois aucune trace de lutte sur le corps de Brown. Certains prétendent plutôt que c'est le policier qui a tenté de l'amener dans la voiture, sans succès. La police a aussi prétendu que Wilson avait été blessé, ce qui s'est avéré faux. Ce mensonge a alors soulevé tous les doutes possibles,

On ne comprendra pas le "comment" et maintenant on baigne dans le "pourquoi?".

Parce que dans ce que l'on connait assurément, il y a les visages des deux personnes impliquées dans le tragique incident.

Micheal Brown était un géant. de 6'4 et pesant 292 livres. Il avait la tête et les formes de Fat Albert. Peut-être pas tout à fait son leadership. Il n'avait jamais eu de casier judiciaire. Sur le photos du jeune défunt, on le voit beaucoup plus souvent défier du regard la caméra que sourire. Il chantait du rap et utilisait Big Mike comme nom d'artiste. Existe-t-il un milieu plus lourd de préjugés que le rap? Big Mike était un cliché en chair et en os. Il était peut-être le plus charmant des black, mais il avait toute les apparences du mean dude.

C'est ce que Wilson a vu/senti.

Darren Wilson est un blanc du sud des États-Unis, une région connue pour ses mauvais rapports avec les noirs depuis toujours. L'animation ci-contre vous montre bien quels États ont favorisé l'esclavage entre 1789 et 1861. Le Tennessee (où se situe la ville de Ferguson) s'y trouve. Wilson a le cheveu ras et l'oreille généreuse. Il a la bouille du redneck. Les "rednecks" ont en commun avec les racistes l'ignorance. Wilson n'est probablement rien de tout ça, mais il en a salement la tête. Il est peut-être aussi tout ça. Peut-être animé d'un sentiment que les noirs sont des citoyens de seconde importance. Il a le regard du gars qui a peur. La tête du leader du ku klux klan. Et la police a menti à son sujet. Il est là aussi très facile de juger un livre par sa couverture. "Wilson fits the profile" comme disent les gens chez l'oncle Sam.

"He fitted the profile" a probablement aussi pensé Wilson quand il a eu peur face à Brown.

Mais comme c'est Wilson qui avait le fusil...

En apparence, le monde entier ne voit que dysfonctions entre frères aux États-Unis. Pas certain que ce soit les images que souhaitent faire véhiculer les U.S. of A dans le monde.

Un juré de 9 blancs et de trois noirs a choisi de ne pas accuser Wilson de quoi que ce soit, faute de preuves. Il fallait s'y attendre. Le gouverneur du Missouri le savait aussi car il avait décrété l'état d'urgence avant même la décision du juré. Barack a lancé un message de paix et d'ordre. La foire a pogné quand même à l'annonce de la décision. La colère est lourde. Les noirs en ont assez. Ils veulent cesser de se confondre à l'ombre des États-Unis. C'est tout de même un des leurs qui gouverne le pays. Et voilà que les Trayvon Martin, Micheal Brown, et autres Rodney King ne trouvent pas justice à leurs yeux.

Les rues sont en feu à Ferguson et c'est tout à fait normal.
Le respect demande parfois le désordre.
Ce n'est pas la mort de Micheal Brown qui cause tout ça.
C'est la répétition de celle-ci années après années, mois après mois.

Si ça peut freiner les manques de jugement potentiels ailleurs.

La mort de Micheal Brown n'aura alors pas été vaine.  

La discussion que les États-Unis doivent avoir avec eux-même ne fait peut-être que commencer.







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