samedi 8 octobre 2016

Snobés du Nobel de Littérature (Illustres tout de même)

Gagner un prix, c'est bien.
C'est un carte qui vous ouvre bien des portes.
Un Nobel? Mérité ou non, c'est la reconnaissance internationale.
Mais encore.

Ce ne sont pas tout qui soient capables de reconnaître Carducci, Bergson, Sillanpää ou Laxness.
Mais ces gens et leurs héritiers ont pu et pourront toujours pavoiser qu'ils ont mérité l'un des prix les plus noble sur terre dans leur domaine.

En voici qui n'ont jamais gagné le prestigieux prix, mais qui ne seront pas restés dans l'ombre pour autant.

Leo Tolstoï (1828-1910)
Un parfum de scandale a navigué en terre suédoise quand le tout premier prix Nobel, en 1901, a été remis au poète français Sully Prudhomme. Pas moins de 42 personalités suédoises avaient alors écrit à l'Académie afin de s'en plaindre. Leo, a pour sa part remercié l'Académie en leur écrivant qu'il était très heureux de ne pas avoir gagné, car il n'aurait pas su quoi faire de tout cet argent qui ne pouvait que lui amener du mal. Tolstoï, auteur des épiques Anna Karenine et Guerre & Paix, était nihiliste, angoissé et extrêmement critique des Églises nationales et du militarisme. Il a entretenu une longue correspondance avec Mahatma Gandhi, duquel il admirait la politique de non violence. Auteur de 4 romans, mais d'une centaine d'essais, nouvelles, contes, récits et pièces de théâtre, il prenait position par rapport aux pouvoirs civils et écclésiastiques, voulant mettre en lumière les grands enjeux de la civilisation.

Marcel Proust (1871-1922)
Il est tout simplement impossible de prédire qui pourrait gagner le Nobel, année après année, car le processus de sélection reste un mystère. On sait que les membres de l'Académie suédoise votent eux-mêmes, que les anciens gagnants votent aussi puisqu'ils sont automatiquement fait membres en gagnant, que certains présidents de grandes sociétés, des auteurs et quelques influents profs de littérature votent aussi. Mais Proust, ne leur a jamais plu. L'oeuvre romanesque de Proust, principalement concentrée dans sa suite romanesque À La Recherche Du Temps Perdu, entre 1913 et 1927, était une réflexion avant-gardiste sur l'amour et la jalousie, traitant du sentiment de l'échec et du vide de l'existence. Le style a révolutionné le principe de narration en proposant des voyages intérieurs dans les corridors mentaux, au lieu de simples suites de petits événements.

Henry James (1843-1916)
Justement inspiré de Proust, Henry James voulait convaincre les britanniques et les Étatsuniens (il avait les deux nationalités) que leur vision de la liberté était la même que celle des auteurs français et qu'ils pouvaient les faire vivre en monologue intérieurs dans leurs écrits. Il est passé maître du point de vue narratif imaginatif qu'il a fait passé du monologue au narrateur mensonger, en apportant une profondeur et un intérêt à la fiction réaliste du début du XXème siècle. Auteur d'une très imposante oeuvre en romans, essais, théâtre, récits de voyage et nouvelles, le cinéma et la télévision lui ont fait la part belle, adaptant presque 40 de ses oeuvres. Parmi les adaptateurs: Claude Chabrol, François Truffaut, Jane Campion, le tandem Merchant/Ivory (3 fois) et Agnieska Holland.

James Joyce (1882-1941)
L'univers fictionnel de Joyce se déroule principalement à Dublin et reflète sa vie de famille, les événements de sa vie et de son entourage, les amis et ennemis de J.J. ainsi que ses jours d'école et de collège. Vivant principalement hors de l'Irlande, il est devenue à la fois le plus cosmopolite des auteurs irlandais et le plus local. La publication de Finnegan's Wake en 1939, texte trop ambitieux, difficile, voire illisible et intraduisible en a dérouté tellement plus d'un, qu'on a presqu'oublié qu'il était aussi l'auteur de A Portrait of the Artist as a Young Man, Dubliners et Ulysse. Samuel Beckett, un de ses jeunes admirateur, et qui avait participé à la production de Finnegan's Wake, a pour sa part gagné le Nobel de Littérature en 1969.

Virginia Woolf (1882-1941)
Moderniste et féministe avant l'heure, qui avait peur de Virginia Woolf? Tous les hommes. Seulement 14 femmes ont déjà gagné le Prix Nobel de Littérature: Selma Lagerlöff, Grazia Deledda, Sigrid Undset, Pearl S Buck, Gabriela Mistral, Nelly Sachs, Nadine Gordimer, Toni Morrison, Wislawa Szymborska, Elfriede Jelinek, Doris Lessing, Herta Müller, la canadienne Alice Munro et la poétesse biélorusse de l'an dernier Svetlana Alexievich. Bipolaire, la suicidé britannique a laissé 10 romans, 6 recueils de nouvelles et quelques 25 autres textes notables, parmi ceux-ci les romans Mrs Dalloway, To The Lighthouse, Orlando et A Room of One's Own à la postérité.

Jorge Luis Borges (1899-1986)
L'auteur argentin privilégie l'aspect fantastique du texte poétique en rejetant une écriture rationnelle qu'il juge contraignante et limitée. Considéré comme l'une des influences majeures du réalisme magique latino-américain, Outre les nombreuses fiction qui pont marqué son oeuvre, on lui doit des poèmes, des essais, des critiques de films et de livres et une envie de réhabiliter le roman policier latino-américain. Son travail est érudit et à l'occasion délibérément trompeur. Il traite souvent de l'infini, de miroirs, de labyrinthes et de dérive de la réalité, de l'identité ou encore de l'ubiquité des choses.

Vladimir Nabokov (1899-1977)
L'écrivain, romancier, poète, traducteur, critique littéraire et enseignant se décrivait comme Étatsunien, né en Russie et formé en Angleterre. Il écrira 10 romans en russe, avant de s'exiler aux États-Unis et d'écrire 9 autres romans, dont le très célèbre et controversé Lolita en 1955. Traducteur et linguiste, il supervisait lui-même la traduction de ses oeuvres et l'a beaucoup fait en Suède.
Dans un curieux nuage de népotisme, Nabokov est nommé en 1974 mais perd au profit de deux Suédois: Eyvind Johnson & Harry Martinson, qui sont eux-mêmes, membres de l'Académie des Prix Nobel.

W.H. Auden (1907-1973)
Le poète et critique anglo-ivorien, plus tard naturalisé Étatsunien, écrit une quantité considérable d'ouvrages et d'essais, ainsi que des pièces de théâtre en collaboration avec son ami Christopher Isherwood. Son travail se caractérise par une variété exceptionnelle allant de formes traditionnelles rigoureuses à des formes originales et complexes. Dag Hammarskjöld, diplomate, membre de l'Académie et lui-même futur Prix Nobel (de la Paix, posthume), le propose et Auden a de très bonnes chances de l'emporter, Toutefois, Quand Auden signe l'introduction d'un livre de Hammarskjöld, Vagmärken, ce dernier s'en trouve si offusqué et bouleversé (car Auden fait référence à des penchants extrémistes) qu'il retire tout simplement sa candidature. Quand Auden refuse de changer sa présentation, il comprend qu'il perd en même temps le Nobel.

Le Prix Nobel de Littérature 2016 sera annoncé aujourd'hui
(est déjà connu si vous me lisez d'ailleurs que dans les Amériques)

Rajout: et ben non! c'était pas samedi!

Aucun commentaire: